dimanche 20 septembre 2015

Faut L'Fer

À l'heure où les frontières de l'est européen se hérissent de rideaux de barbelés, Isaac Ellwood, Jacob Haish et Joseph Glidden doivent se retourner dans leur tombe en apprenant que la cote de l'action "fil de fer barbelé" connaît une forte hausse en Europe.

Isaac Ellwood.

Jacob Haish.

Joseph Glidden.

Isaac Ellwood, Jacob Haish et Joseph Glidden sont les inventeurs du fil de fer barbelé. Ils sont enterrés à De Kalb en Illinois aux États-Unis. C'est là, dans cette ville qu'ils ont pratiquement créée, qu'est né le fil de fer barbelé, aux environs de 1875.

Brevet déposé par Isaac Ellwood, le 24 février 1874.


En quelques années, les besoins énormes en fil de fer barbelé ont amené les inventeurs à produire en très grande quantité dans des usines implantées à De Kalb. Ce qui a fait, en moins de cinq ans, de Isaac Ellwood, Jacob Haish et Joseph Glidden des hommes à l'imposante fortune.


Dans cette Amérique toute occupée à la mise en valeur des terres conquises par les pionniers, les besoins de clôtures pour délimiter les espaces dédiés au bétail sont énormes. Mais c'est peut-être dans la protection des lignes de chemin de fer, qui se développent et parcourent le pays en tous sens, que le besoin de fil barbelé est le plus important.


Si le musée Ellwood à De Kalb permet de découvrir au moins 200 variétés de barbelé, ce sont en fait plus de 1000 versions du fil de fer "accrocheur" qui ont été développées à cette époque. La plupart, pourtant brevetées, ne seront jamais produites en grande quantité.


Dans un contexte économique aussi favorable, toutes les grandes marques de fil de fer barbelé rivalisent d'ingéniosité pour faire la promotion de leur produit à l'aide d'affiches, de catalogues et de publicités dans les journaux.

William Ellwood.

Harriet et Isaac Ellwood ont eu sept enfants, mais plusieurs sont décédés en bas âge. Chez les garçons, William et Perry occuperont des situations prestigieuses, mais aucun ne s'investira dans le fil de fer barbelé. Perry, le plus jeune, fait carrière dans la banque et William, le plus âgé, devient l'un des plus importants importateurs de chevaux percherons des États-Unis, entre 1880 et 1890.

Dans cette décennie, les visites de William Ellwood ou de son représentant Thomas Sloan dans le Perche ont été quasiment annuelles et les importations pouvaient atteindre, dans la deuxième partie de la décennie, une centaine de chevaux à chaque voyage d'un représentant de la maison Ellwood.

Dans un article publié le 20 décembre 1911 dans le magazine agricole américain Breeder's Gazette, l'étalonnier du Perche Edmond Perriot dit :  "Si je me rappelle bien, ce sont les Ellwood qui, vers 1881, ont été les premiers à manifester le désir d'acheter des chevaux plus gros...". Pendant toutes ces années, Mark Dunham et William Ellwood se livrent une concurrence de tous les instants pour prélever les plus beaux étalons. Cependant, chacun a son pré carré. Ernest Perriot père, de la ferme de la Chenelière à Nogent-le-Rotrou, ne laissait jamais partir ses étalons avant que Mark Dunham ne soit passé. Pour William Ellwood, c'est au sein de l'écurie d'Auguste Tacheau père près de la Ferté-Bernard qu'il avait ses entrées privilégiées.

Le percheron Chéri, peinture de Lou Burk.

Chéri, répertorié avec le numéro 2403 dans le stud-book de la Société hippique percheronne de France, a été pendant plusieurs années l'étalon emblématique de l'élevage Ellwood. Né le 13 juin 1881 chez l'éleveur ornais Célestin Caget, Chéri a été importé par William Ellwood en 1885 après avoir obtenu l'année précédente à l'occasion du 1er Concours de la race percheronne à Nogent-le-Rotrou une place de 3ème.


Situées à quelques centaines de mètres du centre de la petite ville de De Kalb, les habitations de la famille Ellwood étaient rassemblées sur un même site. William était en charge des 5 fermes situées autour de De Kalb et qui accueillaient les percherons ainsi que les demi-sang dont il faisait commerce.

Catalogue fil de fer barbelé Glidden-Ellwood de 1884.

Publicité fil de fer barbelé de l'entreprise Jacob Haish.

Récompense obtenue par l'élevage Jules Chouanard pour un 2ème Prix Chevaux de 3 ans au concours national de la race organisé par la SHPF à Nogent-le-Rotrou en 1890.

Dans cette période des quarante glorieuses qui va de 1874 à 1914, les acheteurs américains pouvaient aisément être divisés en deux catégories. Il y avait ceux, comme Dunham, Ellwood, Singmaster, McLaughlin, qui achetaient pour revendre aux États-Unis mais aussi pour leurs propres élevages, et qui étaient essentiellement intéressés par les meilleurs chevaux primés dans les concours. Et puis, il y avait de purs marchands, en général beaucoup moins regardants sur la qualité des chevaux.
Une tradition en vigueur chez les plus importants éleveurs de cette époque voulait qu'un acheteur reçoive "en cadeau" les médailles gagnées dans l'année par le cheval en partance pour l'Amérique. En cette année 1890, outre la médaille "Jules Chouanard", William Ellwood est rentré dans l'Illinois avec 35 autres médailles.

William Ellwood au Texas.

C'est en 1889 que William Ellwood et son père Isaac ont commencé à s'intéresser au Texas. Dans les années qui ont suivi, la famille Ellwood a fait l'acquisition de vastes terres dans cet État du sud et possédait un nombre important de ranches dans neuf districts différents. Des fermes, entourées sans doute de fils barbelés, qui comptaient plusieurs milliers de têtes de bétail parmi lesquels quelques centaines juments percheronnes.
Devenu le gestionnaire des affaires texanes, William Ellwood s'est progressivement désintéressé des affaires percheronnes et le Perche perdit ainsi un de ses amis et une petite partie de ses revenus.

La résidence de Harriet et Isaac Ellwood, telle qu'elle se présente actuellement.

Les habitations de la famille Ellwood, devenues le Ellwood House Museum, ont été conservées à peu près dans leur état de cette fin de 19ème siècle, et se visitent en même temps qu'un bâtiment qui abrite de très nombreux documents liés à la saga du fil de fer barbelé et aussi quelques pièces et documents percherons.

Tous les documents publiés dans cet article proviennent du Ellwood House Museum, De Kalb, Illinois.

1 commentaire:

Brigitte Guillaume a dit…

Quand Jean-Léo dénoue les fils de l'histoire Percheronne, c'est toujours un vrai bonheur.
Sinon, pour répondre aux événements actuels, saluons aussi Régis Auderset pour son invention de la pince coupante...