vendredi 8 août 2014

HPD > Vous Avez Dit Percheron ?



Fredericksburg. Ohio.
Le croisement des routes 501 et 2 marque le centre de la bourgade. Le Pizza Quick, avec ses deux tables en extérieur au bord de la rue, offre un excellent point de vue sur la circulation.



Mais ! Mais ! C'est... Mais si, c'est bien elle ! C'est Christine ! Christine Sallé... à Fredericksburg dans l'Ohio ?... qui vient au Pizza Quick !

De gauche à droite : Bernard Michon, Christine Sallé, Jean-Baptiste Ricard, Francis Valognes, Marie-Ange Valognes, Éloïse Bethery et Valérie Sallé.

En fait, Christine Sallé n'était pas la seule Française à assister aux Horse Progress Days. Ils ne sont pas moins d'une dizaine, tous liés d'une manière ou d'une autre aux chevaux de trait, à avoir fait le voyage de l'Ohio.
Christine Sallé, donc, mais aussi un autre débardeur sarthois, Jean-Baptiste Ricard, un fabricant de matériels hippomobiles, Bernard Michon et Éloïse Bethery, un prestataire vigneron en traction animale, Ramon Garcia, un éleveur et utilisateur de chevaux percherons, Francis Valognes et son épouse Marie-Ange, et une utilisatrice de chevaux percherons, Valérie Sallé. C'est la 1ère année que des Français se déplacent aussi massivement pour assister aux HPD.

Francis Valognes et Christine Sallé autour d'un percheron de show.

Des roues increvables qui intriguent le débardeur Jean-Baptiste Ricard.

Bernard Michon sur le site de fabrication des outils Pioneer.

Christine Sallé n'a rien raté du débardage.

Ramon Garcia, assis à gauche, s'est fondu dans la foule.

Christine et Valérie Sallé sont allées à la recherche de chevaux percherons.

Un poulain de Pleasant View King, étalon de l'élevage Pennwood.

Avec Francis Valognes, Christine Sallé, Bernard Michon et Valérie Sallé, sortes de noyau dur de l'élevage et de l'utilisation du cheval percheron, il n'est pas étonnant que les percherons des HPD et du County de Holmes aient été passés au peigne fin.
Alors, les percherons américains ?
Christine Sallé est la première à dégainer : "C'est une autre race". Valérie Sallé, elle, a passé son temps à chercher. En vain. "Mais, où est passé le type percheron ?". Quant à Francis Valognes, il a un jugement lapidaire qui en dit long quand on veut bien comprendre entre les mots : "Ce sont des percherons américains".

De toute évidence, les éleveurs et utilisateurs américains tirent le cheval percheron vers le haut. Grands, très grands, les percherons n'arrêtent pas de prendre de la hauteur. À en devenir démesurés et mal commodes au possible. Surtout pour qui n'a pas l'intention de pratiquer l'attelage de type show.
S'il n'y avait que la grandeur...
Les membres ? Fins, tubulaires, à peine marqués aux genoux.
Le poitrail ? À peine plus développé qu'un mouchoir de poche.
L'encolure ? Droite. Disparue, l'encolure rouée qui a contribué à composer l'image du cheval percheron.
Ce bilan, nul ne le conteste. Il suffit d'ouvrir les yeux pour s'en convaincre. Ce percheron de show, c'est ce que réclame "Le Marché". Rappelons que la Société percheronne américaine n'a jamais instauré de standard et que le seul standard reconnu, c'est "Le Marché". Le Marché du percheron de show, c'est actuellement l'espoir d'une vente à 10, 20, 30000 $. Le percheron destiné au travail, prêt à l'utilisation, se négocie entre 2500 et 5000 $ au grand maximum.

Mais il y a bien des percherons davantage typés travail chez les Amish, allez-vous me dire. Reprenant ainsi le leitmotiv selon lequel les Amish ont toujours été les gardiens vigilants de la maison percheron et du cheval de trait en général. Que nenni ! Les éleveurs de percherons amish ou autres suivent presque tous le même cheminement. Cet éleveur et paysan amish de la région de Fredericksburg, qui en possède une vingtaine, le confirme : "Le commerce des percherons de show est de très loin le plus rémunérateur. Les prix peuvent atteindre plusieurs dizaines de milliers de dollars. Alors tout le monde essaie d'abord de produire du percheron de show, grand, très léger avec des allures enlevées, même chez nous les Amish. Quand ça ne marche pas, ce qui est souvent le cas, les chevaux sont utilisés pour le travail agricole".
L'élevage percheron américain semble donc tourné vers une production de type unique, même si au final l'utilisation se révèle être bicéphale.

Écurie Circle S Percherons, Ohio.

Nos amis français, au cours de leur revue de détail des chevaux percherons, ont aussi eu quelques sujets d'étonnement. Avec par exemple l'enrênement très contraignant des chevaux de show et aussi des chevaux de buggy, qui les oblige à garder la tête relevée en toutes circonstances ; avec les mors doubles apparemment très durs utilisés pour ces shows ; et bien évidemment avec les ferrures aux formes artificielles destinées à contraindre les chevaux à adopter ce piaffer si particulier.
Dans son livre Work Horse Handbook, Lynn R. Miller, la plus grande autorité américaine en ce qui concerne les chevaux de trait, évoque ces ferrures. "Les chevaux de trait qui sont ferrés pour les shows ont les pieds parés dans des formes artificielles et les ferrures les obligent à adopter des positions et des allures qui ne sont pas naturelles, avec des mouvements amplifiés. Le résultat après seulement quelques années est que ces animaux sont très sujets à des boiteries naviculaires du fait que les tendons du talon subissent des pressions trop importantes".


On peut encore citer cet autre passage du livre de Lynn Miller en guise de conclusion. "En chiffres, la race percheronne est la 2ème race de trait la plus populaire, avec un passé et une contribution importante au travail agricole et forestier. Certains critères utilisés par des éleveurs qui sont à la recherche d'allures exagérées créées artificiellement peuvent conduire cette vieille race stable vers des difficultés génétiques dans un futur proche. Il n'y a tout simplement pas assez de chevaux dans les races de trait pour s'amuser avec un capital génétique limité sans en payer le prix un jour".

 

6 commentaires:

LICHTFUS, thierry a dit…

Conclusion restons bien chez nous pour acheter de vrais percherons et non si j'ose dire un cheval appelé a souffrir de la vanité des hommes.

Anonyme a dit…

On dirait que Ramon à piqué le chapeau de l'Amish assis plus haut et qu'il se marre!
Christine Sallé

Sylvain CHERON a dit…

si j'ai bien compris, un nouveau débouché s'annonce pour nos éleveurs soucieux de produire des percherons aux modèles et allures aptes à l'utilisation: le marché américain!
Et pourquoi pas aussi pour les machines agricoles à traction animale.
Où faut-il s'inscrire pour être du prochain voyage?

Jean-Marie Rousset a dit…

Le regard et les retours de personnes passionnées et directement concernées par notre cheval percheron, du journaliste aux éleveurs et en passant par les utilisateurs et les concepteurs de matériel, sont toujours très intéressant.
Que retenir de tout cela ? Que ces dérives outre atlantique (à notre sens évidemment) nous guettent si nous n’y prenons garde. Pour autant tout n’est certainement pas à rejeter. Nos étalons US utilisés chez nous ne nous ont pas amené que de mauvaises choses quand ils ont bénéficié d’accouplements judicieux. Le « retrempage » est pour ainsi dire fait et posons nous au moins la question de savoir s’il n’est pas suffisant et sinon que pourrions nous trouver « la bas » que nous n’ayons pas ici ?
Relevons quand même que c’est « Le Marché » qui façonne le modèle et n’oublions pas que de tout temps cette faculté d'adaptation a été la grande force des éleveurs de percherons…
Aujourd’hui, en 2014, on voit apparaître au National un concours avec des Hongres et des tests de tempérament, super c’est un bon début…
Pour en revenir au marché, chez nous dans le sud, 99% des chevaux de traits à la traction sont de race comtoise… pas trop grands, ils ne « font pas peur », ne mangent pas beaucoup et ne bougent pas, pépères … Nos percherons paraissent énormes mais nous n’avons pas (ou plus ?) de chevaux de type postier ou artilleur, autour de 1m60 au garrot, des chevaux qui paraissent plus accessibles aux yeux de potentiels acheteurs. Il y a certainement une place pour ce cheval type « Félix Potain » mais saurons nous retrouver ce format et le voulons nous vraiment ?
Amicales pensées à toutes et à tous.

Jean-Marie Rousset a dit…

"Potain de Potain", sans u mais aussi sans a, c'est bien Félix Potin qu'il faut lire.
JMR

Stéphane PROVOST a dit…

Belle expédition, bravo à vous.
Stéphane PROVOST.